Essai de JL pour tester Dotclear

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jeudi, mars 5 2009

Qui ?

Vous pouvez aller voir quelques-unes de mes vidéos : ici.

Pour me découvrir un peu plus, je vous conseille de lire dans mes "Carnets" : Le journal des Lettres vidéo écrit lors de ma "résidence d’artiste", en 2005, sur le quartier d’Empalot à Toulouse. Vous trouverez aussi dans cette rubrique quelques articles parus dans la presse me concernant.

Pour les plus pressés, mon CV est à votre disposition .

Vous avez aussi la possibilité de grappiller comme bon vous semble et en suivant votre humeur.

samedi, septembre 13 2008

BLEU DE TRAVAIL ET BLEU DU CIEL

Ceux qui ne veulent pas mourirUn film réalisé en 2000 sur les intermittents du spectacle et le rapport au travail.

Fuir l’ennui… Se passionner pour son métier… Un art de la vie… Mais comment réconcilier bleu de travail et bleu du ciel ?

Manuels, intellectuels, polyvalents, c’est avec la même habileté qu’ils jonglent avec poste à souder, flammes ou dossiers de subventions. Rejetant les formes traditionnelles du salariat, ils ont choisi ce mode de vie. Pourtant ils sont précaires, le plus souvent Rmistes, avant de devenir « intermittents du spectacle ».

A travers les préoccupations de ces professionnels du spectacle, le film interroge le rapport au travail aujourd’hui.

Voir le film, 52 mn :


L’idée de ce film est née fin 1996, il a fallu presque trois ans pour trouver le financement, puis quelques mois pour le tourner, le monter et le sortir en 2000. Il a été diffusé sur France 3 Sud puis dans la “Case de l’oncle doc” sur France 3 nationale.

J’avais les rushes tournées sur les luttes de 1996/1997, mais aucun débat d’Assemblée Générale.

J’avais en tête la réflexion portée en 1996 et 97 par les coordinations nationales sur notre travail, des textes de Maurizio Lazzarato et d’André Gorz. Le terme d’”emploi discontinu” n’avait pas encore vraiment fait son apparition, on parlait de revenue garanti pour tous, d’étendre ce “statut” (qui en n’est pas un) à tous les précaires, d’y voir une autre manière de partager le travail et pourquoi pas : les richesses.

Ce film pose des pistes de réflexion sur un “autre travail” qui échapperait à la notion de labeur.

Roland Barthes : “L’activité structuraliste” ou l’art du montage ?

R. BarthesLe but de toute activité structuraliste, qu’elle soit réflexive ou poétique, est de reconstituer un ” objet ” de façon à manifester dans cette reconstitution les règles de fonctionnement (les ” fonctions “) de objet. La structure est donc en fait un simulacre de l’objet, mais un simulacre dirigé, intéressé, puisque l’objet imité fait apparaître quelque chose qui restait invisible, ou si l’on préfère, inintelligible dans l’objet naturel. L’homme structural prend le réel, le décompose, puis le recompose ; c’est en apparence fort peu de choses (ce qui fait dire à certains que le travail structuraliste est ” insignifiant, inintéressant, inutile, etc. “). Pourtant, d’un autre point de vue, ce peu de chose est décisif ; car entre les deux objets, ou les deux temps de l’activité structuraliste, il se produit ; du nouveau, et ce nouveau n’est rien moins que l’intelligible général : le simulacre, c’est l’intellect ajouté à l’objet, et cette addition a une valeur anthropologique, en ceci qu’elle est l’homme même, son histoire, sa situation, sa liberté et la résistance même que la nature oppose à son esprit (…).

L’activité structuraliste comporte deux activités typiques : découpage et agencement. Découper le premier objet, celui qui est donné à l’activité de simulacre, c’est trouver en lui des fragments mobiles dont la situation différentielle engendre un certain sens ; le fragment n’a pas de sens en soi, mais il est cependant tel que la moindre variation apportée à sa configuration produit un changement de l’ensemble (…). Les unités posées, l’homme structural doit leur découvrir ou leur fixer des règles d’association : c’est l’activité d’agencement, qui succède à l’activité d’appel. La syntaxe des arts et des discours est, on le sait, extrêmement variée ; mais ce que l’on retrouve dans toute oeuvre de projet structural, c’est la soumission à des contraintes régulières, dont le formalisme, improprement incriminé importe beaucoup moins que la stabilité ; car ce qui se joue à stade second de l’activité de simulacre, c est une sorte de combat contre le hasard… : c’est par le retour régulier des unités et des associations d’unités que l’oeuvre apparaît construite, c’est à dire douée de sens (…).

BARTHES Roland ; ” L’activité structuraliste ” (1963) ; in Essais critiques, ed. 1964, pp.215-218.

Le grain de la voix et celui du montage

Lors des entretiens je privilégie toujours le son à l’image. J’aime recueillir la voix au plus près. Il me faut qu’elle soit présente, à toucher, propre de toute rumeur, exempte d’un lieu, d’une pièce, d’une salle. Pour qu’elle puisse glisser dans le film, pour que le personnage puisse habiter le film en son entier ou plus partiellement pour qu’il habite les images mises sur sa voix. Pour que ces images habitent sa voix. Cette voix ordonne ces images ?
J’aime utiliser la voix qui peut ne pas être collée au corps et traitée comme une matière sonore.

Par contre quand un personnage parle en se déplaçant j’aime entendre les variations de la résonance du lieu. Là, c’est plus le lieu qui m’importe, à ce moment là il est habité par le personnage.

On m’a souvent reprocher que j’ai trop régulièrement la manie de ne pas mettre « in » les personnes qui me parlent.
Pour quelles raisons ?
Je peux tricher ? Tromper sur le discours ? Mais on peut aussi le faire avec une voix « in ». Il suffit de couper là où cela nous intéresse. Ou de poser la question qui se prête à cela. Tout est question de confiance. Cela ne ressemble pas au réel ?
Ce n’est pas du documentaire réaliste, naturaliste, une voix qui décolle du corps ? Oui, tout à fait, et c’est pour cela que je l’utilise ainsi.

Car je pense que ce sont le réalisme et le naturalisme qui sont trompeurs et menteurs (voir l’émission Strip-Tease qui a servit de modèle à tant de…) ; en se rendant transparent en tant que réalisateur, en enlevant toutes les marques d’énonciation, à faire comme s’il n’y avait pas de passeur me semble participer à une grande tricherie ; comme, de la même façon, rendre fluide et transparent le montage tout au long d’un film ou de n’utiliser que des plans séquences par exemple.

En ce qui me concerne, faire du documentaire c’est pouvoir jouer avec toutes les matières qui se présentent à moi ou que je vais chercher, ou provoquer… afin de rendre une des« réalités » (la mienne ?) mais sans chercher à imiter le réel.
Il s’agit pour moi de déconstruire pour construire et tenter que quelque chose remonte à la surface. Transmettre à travers l’agencement de toutes ses matières une somme de sens, de sensations, d’expériences.

Alors j’utilise la voix de mes personnages en « off », il peut y avoir de la fiction, de l’animation, des photos, du clip… je glisse des faux raccords, je change de structure d’une séquence à l’autre, j’organise des mises en abîmes du film, je boucle des plans… Et j’essaie que tout cela marche ensemble en faisant semblant de raconter une histoire qui tient la route.

Je prends du plaisir à faire ainsi, sans limites, ou seulement avec une seule : celle d’une éthique.
C’est pour cela que je préfère fabriquer du documentaire plutôt que de la fiction. Je m’y sens plus libre. La fiction pour être crédible doit être naturaliste.


Pour celles et ceux que cela peut intéresser, voici une analyse sur la voix off au cinéma (de fiction) à partir du film La ligne rouge de Terrence Malick :
Le bercail et la voix. À propos de The Thin Red Line de Terrence Malick
par Johanne Villeneuve